Une publication dans Journal of Neuroscience

Les battements du cœur peuvent aider à détecter des signes de conscience chez des patients après un coma



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Une nouvelle approche pour évaluer la conscience de soi chez les patients qui ne retrouvent pas pleinement conscience après un coma, résultat d’une collaboration entre l'École normale supérieure – PSL (Paris), l'Université de Liège (GIGA Consciousness) et le Centre du Cerveau (CHU de Liège).

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ne nouvelle étude menée conjointement par l'Université de Liège et l'École normale supérieure – PSL montre que les interactions cœur-cerveau, mesurées à l'aide de l'électroencéphalographie (EEG), constituent une nouvelle voie de diagnostic pour les patients présentant des troubles de la conscience. Cette étude est publiée dans la revue Journal of Neuroscience.

Catherine Tallon-Baudry (Département d’Études cognitives, ENS, CNRS) explique : « La communauté scientifique savait déjà que chez les participants sains, la réponse du cerveau aux battements du cœur est liée à la perception, au corps et à la conscience de soi. Nous montrons maintenant que nous pouvons aussi obtenir des informations cliniquement significatives si nous sondons cette interaction chez des patients présentant des troubles de la conscience. » Au cours des dernières décennies, plusieurs améliorations importantes ont été apportées au diagnostic de ces patients, mais la mesure de la conscience de soi chez ces patients qui ne peuvent pas communiquer demeure un grand défi.

Pour leur étude, les chercheurs ont inclus 68 patients présentant un trouble de la conscience. 55 patients souffraient de l'état de conscience minimale et présentaient des signes de conscience fluctuants mais cohérents, mais étaient incapables de communiquer, et 13 patients se trouvaient dans un état d'éveil sans réponse (appelé auparavant état végétatif) et ne présentaient aucun signe comportemental de conscience. Ces patients ont été diagnostiqués à l'aide de l'échelle révisée de récupération du coma, un test clinique standardisé permettant d'évaluer le comportement conscient.

« Comme ces patients ont subi de graves lésions cérébrales, ils peuvent être incapables de montrer des signes comportementaux de conscience. Par conséquent, nous avons également fondé notre diagnostic sur le métabolisme du cerveau comme sonde de la conscience. Il s'agit d'une technique de neuro-imagerie de pointe qui permet d'améliorer le diagnostic des patients souffrant de troubles de la conscience. Ces images très instructives ne peuvent être acquises que dans des centres de recherche médicale spécialisés », explique Jitka Annen (GIGA Consciousness, ULiège).

Les chercheurs ont enregistré l'activité cérébrale à l'état de repos (c'est-à-dire sans tâche ou stimulation spécifique). Ils ont sélectionné des segments de l’EEG juste après un battement de cœur et des segments à des points de temps aléatoires (c'est-à-dire non liés à un battement de cœur). Ils ont ensuite utilisé des algorithmes d'apprentissage automatique pour classer (ou diagnostiquer) les patients dans les deux groupes de diagnostic.

Diego Candia-Rivera (Département d’Études cognitives, ENS) précise : « Les segments de l’EEG non reliés à des battements cardiaques étaient informatifs pour prédire si un patient était conscient ou non, mais les segments de l’EEG reliés à des battements cardiaques étaient eux plus précis à cet égard. Nos résultats indiquent que le potentiel évoqué par les battements cardiaques peut nous donner des preuves supplémentaires de la présence de la conscience. »

Il est important de noter que les réponses évoquées par les battements cardiaques étaient plus conformes au diagnostic basé sur le métabolisme cérébral qu'au diagnostic basé sur l'évaluation comportementale. Il semble donc que la réponse évoquée du rythme cardiaque puisse être utilisée pour mesurer une perspective de (récupération de) conscience de soi qui n'est pas évaluée avec succès à l'aide d'outils comportementaux.

« Le prochain défi est de traduire nos résultats en applications cliniques afin que tous les patients souffrant de troubles de la conscience puissent bénéficier d'un meilleur diagnostic grâce à des technologies d'évaluation au chevet du patient largement disponibles », conclut Steven Laureys, responsable de l'unité de recherche GIGA Consciousness à l’ULiège et du Centre du Cerveau au CHU de Liège.

Référence scientifique

Neural responses to heartbeats detect residual signs of consciousness during resting state in post-comatose patients, Diego Candia-Rivera, Jitka Annen, Olivia Gosseries, Charlotte Martial, Aurore Thibaut, Steven Laureys, Catherine Tallon-Baudry, Journal of Neuroscience.

Contacts

Catherine Tallon-Baudry, Chercheuse CNRS au Laboratoire de Neurosciences Cognitives et Computationnelles, Département d’Études cognitives, Écoles normale supérieur

Clémentine Eyraud, Chargée de communication, Département d'Études cognitives, EUR Frontiers in Cognition

Steven Laureys, Directeur de recherches FNRS au GIGA Consciousness – Coma science group et Centre du cerveau, ULiège & CHU de Liège

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