Environmental Health Perspectives

L’impact des polluants environnementaux sur la reproduction des générations futures



Actuellement, nous faisons face à un enjeu environnemental, sociétal et sanitaire majeur dû à la présence croissante de polluants environnementaux issus de l’industrie agroalimentaire (ex. pesticides et fongicides), pétrochimique (ex. bisphénols et phtalates), pharmaceutique (paracétamol) et cosmétique (filtres solaires). Nous sommes tous exposés au quotidien à plusieurs dizaines de substances. Parmi ces polluants, plusieurs centaines sont identifiés comme perturbateurs endocriniens (PEs). Ces substances capables d’altérer l’homéostasie hormonale et d’augmenter le risque de nombreux troubles sont le sujet de recherche principal de l’équipe d’Anne-Simone Parent au GIGA-Neuroscience (Laboratoire de Neuroendocrinologie -ULiège). L’organisme en développement et en particulier le cerveau, sont spécialement sensibles aux PEs. Une exposition aux PEs durant le développement peut entrainer une altération des circuits neuronaux qui vont contrôler le développement sexuel ainsi que la fonction reproductive à l’âge adulte. De plus, des données récentes suggèrent que ces altérations peuvent persister sur plusieurs générations.

Au sein du laboratoire d’Anne-Simone Parent, un étude récente publiée dans Environmental Health Perspectives s’est intéressée aux effets d’un mélange de 13 PEs auxquels nous sommes couramment exposés à de faibles doses sur le développement sexuel et le comportement maternel sur trois générations de rats femelles. Le mélange contenant des plastiques, pesticides, fongicides, filtres solaires et paracétamol a été administré avant la gestation jusqu’à la fin de la lactation. L’étude montre qu’une exposition développementale à un mélange de PEs entraine une altération de la puberté, du cycle ovulatoire et de la folliculogenèse ovarienne deux et trois générations après l’exposition. Comme le souligne Anne-Simone Parent, « ces résultats remettent en question la façon actuelle d’évaluer la dangerosité des perturbateurs endocriniens puisque leurs effets ne sont pas étudiés directement après l’exposition pendant la grossesse, mais aussi lors des 2ème et 3ème générations qui n’ont pas été directement exposées ». Ces effets sont donc particulièrement inquiétants puisque la troisième génération n’a jamais été exposée directement aux PEs. L’étude montre ainsi que la transmission de ces effets sur la reproduction pourrait être expliquée par une atteinte des cellules germinales qui entrainerait ensuite une reprogrammation épigénétique du contrôle hypothalamique de la reproduction. En outre, l’équipe a mis en évidence des altérations du comportement maternel causées par des anomalies de la signalisation dopaminergique hypothalamique. Ce comportement maternel altéré est transmis de génération en génération par apprentissage.

Globalement, cette étude met en évidence les mécanismes cérébraux expliquant les effets d’un mélange de PEs sur la reproduction à travers plusieurs générations d’animaux. Ces résultats soulèvent des inquiétudes sur les conséquences potentielles des PEs sur nos générations futures.

 

Référence

Multi- and Transgenerational Outcomes of an Exposure to a Mixture of Endocrine-Disrupting Chemicals (EDCs) on Puberty and Maternal Behavior in the Female Rat

David López-Rodríguez, Carlos Francisco Aylwin, Virginia Delli, Elena Sevrin, Marzia Campanile, Marion Martin, Delphine Franssen, Arlette Gérard, Silvia Blacher, Ezio Tirelli, Agnès Noël, Alejandro Lomniczi, Anne-Simone Parent

Environ Health Perspect. 2021 Aug;129(8):87003.

Contact

Anne-Simone Parent

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